Aussi pudique que chaleureux, le chef Pierre Sang, révélé par l’émission Top Chef en 2011, est à la tête de plusieurs restaurants parisiens.
« Coréen de naissance, Auvergnat de cœur », voilà comment se présente Pierre-Sang Boyer, dit Pierre Sang. Adopté à sept ans, il passe les premières années de sa vie dans un orphelinat sud-coréen avant d’atterrir à Lantriac, en Haute-Loire. En 2011, M6 en fait l’un des chouchous de la saison 2 de son émission culinaire. Son accent et son côté bon vivant séduisent les téléspectateurs tandis que sa cuisine originale et raffinée le portera jusqu’aux portes de la finale.
Le jeune trentenaire, qui a fait ses premières armes à Lyon, Londres puis Séoul, ouvre en 2012 son tout premier restaurant Pierre Sang in Oberkampf dans le 11e arrondissement de Paris. Une adresse qui cartonne dans le quartier et qui sera rapidement déclinée quelques mètres plus loin avec Pierre Sang on Gambey (2014) puis Pierre Sang Signature (2017).
« Quand je suis arrivé en France, à l’âge de sept ans, j’avais tout oublié de la Corée : la langue, le pays, les saveurs. »
Sur la Corée du Sud, le chef reste plus discret. Pour Koï, il revient sur ses rencontres avec des « personnes extraordinaires » de la gastronomie, et sur l’ADN de sa cuisine.
Vous avez indiqué dans plusieurs interviews que petit vous vouliez être guide de montagne, boulanger ou bien ébéniste. Qu’est-ce qui vous a dirigé vers la cuisine ?
Effectivement, ayant grandi en Auvergne à partir de l’âge de sept ans, je voulais être guide de montagne mais la cueillette de champignons et les parties de pêche de mon enfance m’ont fait choisir la cuisine comme vocation.
Lorsque vous vous êtes lancé dans la cuisine, quelles étaient vos ambitions ?
Je n’avais pas d’ambition ou de but précis, mon seul objectif était d’exercer ma passion, de la partager avec les autres et enfin de la transmettre, mes trois valeurs fondamentales. J’ai saisi les occasions qui se sont présentées et me suis donné les moyens d’y parvenir. Ce, grâce à l’aide de personnes extraordinaires dont j’ai eu la chance de croiser le chemin : Paul Bocuse, Alain Ducasse, Joël Robuchon...
« Je suis reconnaissant de la médiatisation que Top Chef m’a apportée. Elle m’a permis de me faire connaître auprès du grand public, ce qui n’est pas négligeable. »
Avez-vous rêvé d’ouvrir des restaurants, de travailler pour de grands événements comme les Jeux olympiques ?
C’est effectivement un rêve puisque cela me permet de vivre de ma passion. Mais je garde les pieds sur terre, je refuse parfois des sollicitations car le plus important reste pour moi l’exploitation de mes trois établissements, le bien-être de mes employés et la fidélité de mes clients.
Faites-vous partie des candidats d’émissions culinaires qui ne veulent plus revenir sur le passé ou bien êtes-vous fier de cette médiatisation et de ce qu’elle vous a apporté ?
Je suis reconnaissant de la médiatisation que l’émission télévisée à laquelle j’ai participé m’a apportée. Elle m’a permis de me faire connaître auprès du grand public, ce qui n’est pas négligeable. Mais il faut faire très attention à la télévision. Elle ne montre pas à quel point notre métier est dur et exigeant. Il faut travailler encore et encore, savoir s’entourer et avoir la volonté de s’adapter à la clientèle.
« J’ai davantage de souvenirs de mon enfance passée à Lantriac en Haute-Loire que mes premières années en Corée. »
Vous êtes né en Corée du Sud mais avez quitté le pays à sept ans. C’était comment, enfant, de vivre avec cette histoire-là en France
J’ai davantage de souvenirs de mon enfance passée à Lantriac en Haute-Loire que mes premières années en Corée. J’ai été élevé dans un environnement en pleine nature, ma famille m’a transmis cet esprit de convivialité autour de la table.
À vingt-quatre ans, vous avez choisi de retourner en Corée du Sud. Qu’est ce qui a motivé cette décision ?
Quand je suis arrivé en France, à l’âge de sept ans, j’avais tout oublié de la Corée : la langue, le pays, les saveurs. Je suis alors retourné dans mon pays natal à l’âge de vingt-quatre ans pour travailler dans un restaurant Français à Séoul et ainsi renouer avec mes racines.
« Mon équipe est le reflet de ma cuisine et de mon double ADN : français et coréen. »
Dans vos restaurants, vous avez choisi de vous entourer de chefs exécutifs coréens. C’était évident pour vous de proposer une cuisine française teintée de Corée, à votre image ?
Je suis effectivement entouré de chefs coréens comme Lee, qui est à mes côtés depuis l’ouverture de mon premier restaurant , Sungdae, Kim et Kwan Soo. Mais aussi de chefs français, comme Pierre, Allan, François et Antoine. Il est important pour moi qu’il y ait un mélange des cultures au sein de l’équipe, c’est le reflet de ma cuisine et de mon double ADN : français et coréen.
Article initialement publié dans le magazine Koï, numéro 8, novembre/décembre 2018.