Au cœur du « Chinatown » de Houston

Par Julie Hamaïde
Photo de Julie Hamaïde

Le Chinatown de Houston devrait en fait s’appeler Asiatown, réunissant les communautés chinoises, vietnamiennes et est-asiatiques de la ville. Reportage.

Le soleil tape et l’ombre qu’offre le Hong Kong City Mall est plus que bienvenue. Ouvert en 1999, ce centre commercial se situe au cœur du « Chinatown » de Houston réunissant, bien au-delà de la communauté chinoise, toutes les diasporas d’Asie de l’Est et du Sud-Est.

Sous son toit évasé rappelant celui des pagodes et derrière ses portes coulissantes, le Hong Kong City Mall se différencie légèrement de tous les autres centres commerciaux du Texas. Finalement, on se croirait dans les galeries de la Place du Peuple à Shanghai ou de Saigon Square à Ho Chi Minh-Ville. Si le parking à l’américaine nous ancre bien au Texas, les enseignes et les sonorités nous amènent ailleurs. Le long de l’allée principale du centre commercial, les dalles vieillies du carrelage reflètent celles du faux plafond et incitent notre regard à se poser sur les mille et une couleurs présentes. À droite, un stand de produits dédiés aux croyants bouddhistes : bracelets rouges, figurines dorées du Bouddha et autres veilleuses multicolores en forme de lotus. À gauche, un stand de bijoux rutilants en or et en jade et des accessoires pour cheveux en forme de chat ou de lapin.

 

Ce centre commercial se situe au cœur du « Chinatown » de Houston réunissant, bien au-delà de la communauté chinoise, toutes les diasporas d’Asie de l’Est et du Sud-Est.

 

Stand présent au Hong Kong City Mall de Houston, au Texas. 

 

Parmi la vingtaine de restaurants, stands de bubble teas, boutiques ou salons de beauté logés ici, on reconnait une prédominance chinoise et surtout vietnamienne. « C’est une chance pour notre communauté de pouvoir se réunir ici », explique H.C. Chang, membre de l’OCA (association dont la mission est de faire progresser le bien-être social, politique et économique des Américains d'origines asiatiques et des insulaires du Pacifique aux États-Unis). Une communauté qui n’a rien d’anecdotique puisque, selon le recensement américain de 2020, sur 7 millions d’habitants à Houston, 12% se décrivent comme Asiatiques (ou autres), derrière les Hispaniques, non-Hispaniques blancs et non-Hispaniques noirs. En 2019, les populations chinoise et vietnamienne représentaient déjà respectivement 111 000 et 143 000 personnes (selon le Pew Research Institute), uniquement dans la métropole. « Et je suis certain que les chiffes ont augmenté depuis », nous confie H.C. Chang.

 

Au food market du Hong Kong City Mall à Houston, au Texas. 

 

L’immigration d’ampleur venue d’Asie de l’Est a débuté dans les années 1970 et ne cesse de s’accroître. À la fin du XXe siècle, les taux d’immigration venant d’Asie surpassaient même ceux des communautés hispaniques, historiquement très présentes au Texas. Si bien que la société a évolué à leurs côtés. L’université de Houston et l’université Rice leur ont ainsi dédié un centre d’études et un centre d’archives. Trois membres de la Chambre des Représentants du Texas sont issus de ces diasporas : Gene Wu, Robert Vo et Angie Chen Button. Sans compter les commerces et restaurants qui y ont fleuri. « Il doit y avoir au moins 100 boutiques de bubble tea à Houston », s’exclame H.C. Chang.

 

En 2019, les populations chinoise et vietnamienne représentaient déjà respectivement 111 000 et 143 000 personnes à Houston. 

 

Au sein du centre commercial, un grand supermarché spécialisé réunit fruits et légumes frais venus d’Asie, plantes exotiques, nouilles instantanées à profusion (occupant les rayons de 4 allées), crevettes surgelées, sucreries, cuiseurs à riz, chips aux goûts inédits et autres viandes séchées. Cette fois-ci, c’est bien l’abondance américaine que l’on retrouve sur 13 000 mètres carrés.

 

Rangées de nouilles instantanées au Hong Kong City Mall
de Houston, au Texas. 

 

Rogene Calvert, née en 1948 à Houston de parents d’origine chinoise, nous confie : « Depuis ma naissance, j’ai vu notre communauté grandir ». Très active au sein de celle-ci, Rogene Calvert s’est impliquée dans des sujets de santé. « Avant, nous n’avions pas les ressources pour aider ces populations car nous ne disposions pas de clinique où l’on parlait chinois par exemple. Des personnes âgées attendaient des heures en salle d’attente et ne reconnaissaient pas leur nom, mal prononcés par les soignants. Nous avons mis en place des centres d’accueil, comme HOPE Clinic. Au début, ils n’étaient ouverts que 4 heures par mois. Désormais, nous sommes reconnus au niveau national. »

Au Hong Kong City Mall, c’est bientôt l’heure du déjeuner. Certains se pressent dans le foodhall du centre commercial. D’autres remontent dans leur voiture pour traverser la rue et se rendre chez le chef Trong Nguyen, de Crawfish and Noodles, demi-finaliste des James Beard Awards, réputé pour ses écrevisses viet-cajun. Une expérience asio-américaine par excellence.


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