Covid-19 : les escrimeurs japonais et hongkongais cloués à Paris pour plusieurs semaines

Par Pandou Media

Les fleurettistes hongkongais, japonais et français s'entraînent ensemble à l'INSEP. Crédit : FFE

Les équipes d’escrime au fleuret venues du Japon et de Hong Kong s’entraînent depuis plusieurs semaines à l’INSEP avec leurs homologues français. Une situation inédite, due à la crise sanitaire, qui complique leurs allées et venues en Asie. L'accueil de la fédération française d'escrime leur permet de poursuive leur préparation en vue des prochaines compétitions. 

C’est un sacré groupe qui croise le fer ce jour-là à l’Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep), aux portes de Paris. Si les stages à l’étranger sont légion pour les sportifs de haut niveau, il reste assez rare de voir trois équipes nationales s’entraîner ensemble, qui plus est durant plusieurs semaines.

« Nous sommes arrivés mi-décembre, raconte Grégory Koenig, l’entraîneur français de l’équipe de fleuret hongkongaise. L’objectif était de se préparer au Challenge international de Paris [mi-janvier, durant lequel le Hongkongais Cheung Ka Long a remporté la médaille d’or en individuel après l’or olympique à Tokyo ndlr] en évacuant le jetlag et en ayant une qualité d’entrainement avec les Français. » En effet, depuis les Jeux olympiques de Tokyo, les Hongkongais n’ont pas eu la chance de s’entraîner ailleurs. Nicholas Edward Choi, un des espoirs de cette équipe, médaillé d’argent aux Jeux asiatiques de 2018, reconnaît qu’il est plus facile de vivre à Paris en ce moment. « Je suis content d’être ici, car à Hong Kong tout est fermé. » Impossible d’imaginer participer à une compétition en dehors du territoire et revenir pour trois semaines de quarantaine stricte (une mesure qui était en vigueur en décembre*), sans entraînement, pour participer à une nouvelle rencontre une semaine plus tard à l’étranger. 

« Je suis content d’être ici, car à Hong Kong tout est fermé. » 

Pour les Japonais, la situation est légèrement différente. Ils pourraient en effet retourner dans l’archipel entre deux évènements mais sans leur coach Erwann Le Pechoux, lui aussi français mais dépourvu de visa. « Les athlètes sont ici depuis le 4 janvier pour se préparer au Challenge international de Paris. Eux ont accès au Japon, moi non. Certains ont fait le choix de rentrer, huit sont restés. » Aux côtés des Français, les deux équipes se sont réunies à Antony le weekend dernier pour une rencontre amicale proposée par Brice Guyart, président de la commission fleuret masculine de la Fédération française d’escrime après l’annonce de l’annulation de la Coupe du monde de Turin qui devait avoir lieu début février.

Opposition intense entre les nations, qui change des entraînements à domicile. Crédit : FFE

Une situation éprouvante pour les athlètes

Côté japonais ou hongkongais, le séjour parisien à rallonge commence à se faire sentir. « C’est très dur pour mes joueurs, confie Grégory Koenig. Mais la situation à Hong Kong est particulière. Tout est fermé à 18h, la vie n’y est pas très agréable en ce moment. Finalement, ils sont un peu partagés entre la vie compliquée là-bas et la liberté qu’on a ici. » Pour les Japonais, l’éloignement semble encore plus difficile à supporter. « Ils ont besoin de manger japonais, de parler japonais, de rentrer chez eux, où tout est ouvert contrairement à Hong Kong. Ce soir, on va à Val d’Europe faire du shopping », sourit Erwann Le Pechoux qui essaye de trouver des solutions pour les aider à faire passer leur mal du pays.

Au même moment, Saitō Toshiya, fleurettiste japonais, médaillé d’argent aux Championnats du monde de 2017 qui a réalisé une contre-performance aux JO de Tokyo, perd justement patience dans l’enceinte de l’Insep face à son adversaire. Mécontent, il s’énerve et jette son casque. « Au Japon, les entraînements sont moins intenses, explique l’entraîneur français. Ici leurs adversaires sont français ou hongkongais, alors ils ne veulent pas perdre. C’est pas comme à la maison où l’adversaire est un copain. » Tout en rappelant : « Aujourd’hui, le Japon est derrière Hong Kong et la Corée. Mon objectif est déjà d’être qualifié pour les prochains JO. Mais j’ai de la chance, j’ai des gars bosseurs, qui ont envie ».

L'entraîneur français Grégory Koenig coach le champion olympique Cheung Ka Long. Crédit : FFE

Un dénominateur commun : la France

« Ici, il y a aussi l’opposition qui améliore l’entraînement. On a de meilleures conditions car on peut se mélanger aux autres, on ne reste pas avec les mêmes défauts », rapporte Erwann Le Pechoux. Sur la piste, les duels s’enchaînent, entre nations, comme celui qui voit s’affronter Tyvan Bibard, vice-champion du monde junior par équipe en 2019 et Cheung Ka Long, le nouveau roi de la discipline.

Si Grégory Koenig, ancien entraîneur national adjoint de l’équipe de France, a été sollicité par Taiwan puis par Hong Kong pour coacher les athlètes, Erwann Le Pechoux, médaillé d’or en équipe aux JO de Tokyo, vient tout juste de prendre ses fonctions d’entraîneur. « J’ai des relations avec le Japon depuis des années. En rigolant avec Yūki [Yūki Ōta, vice-champion olympique en 2008 à Pékin puis médaillé d'argent par équipe aux JO de Londres en 2012] j’ai dit que le jour où j’arrêterai, j’irai au Japon. J’ai eu des propositions en Asie et ailleurs mais mon choix premier à l’étranger c’était ce pays ».

Sur le bord de piste, les athlètes nous parlent de ce coaching « à la française ». Pour Nicholas Edward Choi, la différence avec un entraîneur chinois est « totale ». « Je dirais que la méthode chinoise est plus intense physiquement. Avec les Français, on se concentre beaucoup sur le mental. Lorsque l’on mélange ces deux styles, cela donne un résultat vraiment très intéressant. »

Les Japonais sont arrivés début janvier. Ils sont impatients de retourner dans l'archipel. Crédit : FFE

 

*Depuis le 8 janvier, les voyageurs en provenance de France, y compris les résidents, se voient refuser l’entrée sur le territoire de Hong Kong, peut-on lire sur le site du ministère des Affaires étrangères.

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