Confinement : ils partagent les astuces de leurs proches en Chine

Par Sophie Kloetzli

Souvent alertées en amont, les personnes d’origines asiatiques en France ont parfois adopté les conseils de leurs proches qui ont été confinés avant eux à l’autre bout de la planète. Elles nous racontent.
[Illustration : HstrongART]

De l’Asie à la France, les secrets pour « survivre » au confinement se transmettent dans le cercle familial et amical. WhatsApp, Slack, WeChat… tous les moyens sont bons pour partager les trucs et astuces et mieux affronter la situation. Créatrice du podcast Melting pot, Mélanie Hong a beaucoup échangé avec ses deux frères résidant en Chine. Leur premier conseil : porter un masque. Une directive moins évidente qu’il n’y paraît, et pas seulement à cause de la pénurie de matériel médical qui frappe la France. « Je ne l’ai pas mis en janvier ni en février, car je n’avais pas envie que les gens me regardent, confie-t-elle. En France, cela signifie qu’on est malade, alors qu’en Chine, c’est un réflexe beaucoup plus ancré, car c’est aussi pour se protéger soi-même. Maintenant que tout le monde est confiné et que plus de gens le portent, c’est plus facile. »

« Je ne comprends pas les gens qui sortent tous les deux jours, tant cette sortie m’a épuisée ! »

« Depuis mi-janvier, avec mon partenaire – qui est chinois –, nous avons progressivement appliqué les conseils pratiques de nos proches en Chine », explique Fred avant de les énumérer : « rester le plus possible à la maison, se faire livrer de la nourriture et désinfecter tout ce qu’on achète, porter un masque et des lunettes de protection dès qu’on sort, revoir son alimentation pour booster son système immunitaire (légumes, riz, thé vert…), faire du sport à la maison (tai-chi matin et soir), des auto-massages… » Certaines de ces astuces, comme désinfecter ses courses, commencent seulement à émerger en France.

Des tips à appliquer en France ?

Peiyi Ho, elle, a reçu une dizaine de masques de son entreprise, basée à Shanghai, qu’elle porte pour aller faire ses courses. Une sortie qu’elle tâche de raréfier au maximum : « Je n’étais pas sortie de chez moi depuis le 15 mars. Je suis allée faire mes courses pour la première fois ce mercredi [le 25 mars]. Dans la rue, j’ai bien fait attention à tenir la distance, et encore davantage lorsque je croisais des personnes âgées. J’ai fait en sorte de prendre des aliments qui peuvent être cuits pour être sûre que la chaleur tue les microbes. Quand je suis rentrée chez moi, j’ai mis tous les aliments dans un récipient à l’entrée pour les laver, désinfecté tout ce que j’ai pu toucher (portable, trousseau de clés…) et mis mes vêtements à la machine à laver. Je ne comprends pas les gens qui sortent tous les deux jours, tant cette sortie m’a épuisée ! » Même prudence pour Mélanie Hong, dont l’un des frères lui a recommandé de ne faire ses achats qu’une fois par semaine et lui a prescrit toute la marche à suivre quand elle sort et rentre chez elle.

 

Pour Peiyi Ho, la plupart des conseils que lui prodiguent ses connaissances et ses proches en Chine sont néanmoins « difficilement applicables en France ». « Les Chinois ne sont pas confrontés à la même situation qu’ici, fait-elle remarquer. Pour eux, quand on n’a pas de protection, il ne faut absolument pas sortir. En Chine, sans masque, on ne peut pas rentrer dans le supermarché. Il faut présenter un QR code sur une appli pour prouver qu’on est en bonne santé. Le risque de contamination est moindre qu’ici ! »

Certaines précautions peuvent même paraître insolites voire excessives vues depuis la France. Comme le dévoile un reportage vidéo, à Nankin, à l'est de la Chine, les habitants sains ne sont pas confinés chez eux, mais les mesures barrières sont appliquées de manière très stricte pour endiguer l’épidémie. Dans les ascenseurs, chacun utilise un mouchoir à usage unique pour appuyer sur les boutons avant de le jeter dans une petite poubelle prévue à cet usage. Au McDo, les clients paient leur commande depuis leur téléphone et l’emballage de la nourriture précise la température du cuisinier et du livreur…

Tutos et challenges

Les réseaux sociaux regorgent eux aussi de conseils pour affronter l’épidémie de Covid-19, parfois de manière originale. Au Vietnam, un groupe de V-pop sollicité par le ministère de la Santé a même créé un clip de prévention (devenu viral) afin de populariser les gestes à adopter pour se protéger du coronavirus, inspirant un challenge de danse – le « Ghen Cô Vy challenge » – sur TikTok.

Peiyi Ho voit d’un œil critique ces contenus qui circulent sur WeChat, YouTube et autres. « J’ai vu passer beaucoup de tutoriels pour confectionner des masques de fortune, ce qui n’est pas une mauvaise idée en soi, mais ce n’est pas aussi efficace que les masques dont les tissus ont été brevetés. Je dois dire que cela m’effraie un peu. » Elle décide alors de prodiguer elle-même ses conseils sur Instagram sur la base des publications officielles et scientifiques qu’elle lit régulièrement sur le sujet.

La circulation des astuces suit celle de la pandémie. Après avoir bénéficié des conseils de ses frères, Mélanie Hong partage désormais les leçons qu’elle tire du confinement avec ses parents. Ceux-ci sont installés en Thaïlande, où la population est en passe d’être confinée à son tour.


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